Le titre complet est Appunti sparsi e persi (1966-1977). Il a été publié en 1983 chez Aelia Laelia, à Reggio Emilia, avec une préface de l’auteure.
Le recueil est divisé en deux parties : une très longue, avec beaucoup de poèmes très courts, Poesie, et une très courte, toute en italique, et composée comme son titre l’indique, Appunti, de notes. Nous n’en donnons ici qu’un très petit nombre qui ne pourra pas en rendre tout la richesse.
Ici comme ailleurs, il y aurait beaucoup à commenter sur la langue et ses particularités. Nous vo*udrions seulement attirer l’attention sur ce très beau terme de la seconde poésie présentée, errabonda, qui est un latinisme que Baudelaire avait utilisé (« Moesta et errabunda ») et Verlaine, à sa suite et à contre-pied (« Laeti et errabundi »). Ce qui nous permet, au passage, de souligner l’influence de Verlaine (comme Lautréamont à qui elle fera une discrète allusion dans le Journal Obtus) sur Amelia Rosselli.
*
Notes éparses et perdues
Poesie | Poésies
una verde angoscia giovanile
per i tuoi versi così lontani
e per la mia
une verte angoisse juvénile
pour tes vers si lointains
et pour la mienne
*
Improbabile sonetto
una vita errabonda
condotta sul filo del rasoio.
Macchiandosi le punta delle dita
l’infarto premeditato
una carovana del tutto obliqua.
Improbable sonnet
une vie errabonde
conduite sur le fil du rasoir.
En me tâchant le bout des doigts
l’infarctus prémédité
une caravane complètement oblique.
*
io responsabile del tuo amore
pudori rubati alla plebe
nel caldo divampare della sonnolenza
un automatismo ci consigliò
moi responsable de ton amour
pudeurs volées à la plèbe
dans l’éclatement de chaleur de la somnolence
un automatisme nous conseilla
*
La messa in scena dell’infanzia;
il folklore punitivo.
L’ora è ingiustificalbimente romantica:
questo chiudere in ritornelli lamentosi
il moralismo dei miei trent’anni
esattamente quel che sono.
Benché
vi fosse fortunosa coincidenza
passando sulla testa dell’alfabeta
forse, forsennata
la povertà portava immediato sollievo.
La mise en scène de l’enfance ;
le folklore punitif.
L’heure est injustifiablement romantique :
cette fermeture en refrains plaintifs
du moralisme de mes trente ans
exactement ce que je suis.
Bien qu’il
y eut coïncidence heureuse
passant sur la tête de l’alphabet
peut-être, forcenée
la pauvreté portait un soulagement immédiat.
*
Lettere al Fratello
Nelle tombe le orgie si fanno da sole
se sole sono le bianche immagini,
io con
la mia parentesi che non doveva durare
i quaderni
della mia mente avvolta nel tuo pastrano
lo sfruttamento
al suo colmo: a te invio
queste brevi denuncie, nessuna
spiegazione può farti tenere il tempo
se il ballabile è questo cratere spento.
Lettre au frère
Dans les tombes les orgies se font toutes seules
si les images blanches sont seules,
moi avec
ma parenthèse qui ne devait pas durer
les cahiers
de mon esprit enveloppé dans ton pardessus
l’exploitation
à son maximum : à toi j’envoie
ces brèves dénonciations, aucune
explication peut te faire tenir la cadence
si la mélodie est ce cratère éteint.
*
(a Pier Paolo Pasolini)
E posso trasfigurarti,
passarti ad un altro
sino a quell’altare
della Patria che tu chiamasti
puro…
E v’è danza e gioia e vino
stasera: – per chi non pranza
nelle stanze abbuiate
del Vaticano.
Faticavo: ancora impegnata
ad imparare a vivere, senonché
tu tutto tremolante, t’avvicinavi
ad indicarmi altra via.
Le tende sono tirate, il viola
dell’occhio è tondo, non è
triste, ma siccome pregavi
io chiusi la porta.
Non è entrata la cameriera;
è svenuta: rivenendoti morto
s’assopì pallida.
S’assopì pazza, e sconvolta
nelle membra, raduna a sé
gli estremi.
Preferiì dirlo ad altra infanzia
che non questo dondolarsi
su arsenali di parole!
Ma il resto tace: non odo suono
alcuno che non sia pace
mentre sul foglio trema la matita.
E arrossisco anch’io, di tanta esposizione
d’un nudo cadavere tramortito.
(à Pier Paolo Passolini)
Et je peux te transfigurer,
te passer à un autre
jusqu’à cet autel
de la Patrie que tu disais
pur…
Et il y a la danse la joie le vin
ce soir: – pour qui ne dîne pas
dans les chambres assombries
du Vatican.
Je fatiguais : encore occupée
à apprendre à vivre, toutefois
toi tout tremblant, tu t’approchais
pour m’indiquer une autre voie.
Les rideaux sont tirés, le violet
de l’œil est rond, ce n’est
pas triste, ma comme tu priais
j’ai fermé la porte.
La femme de chambre n’est pas rentrée ;
elle s’est évanouie : te retrouvant mort
elle s’endormit pâle.
Elle s’endormit pâle, et bouleversée
dans ses membres, elle ramena à elle
les extrêmes.
J’ai préféré le dire à une autre enfance
que ce balancement
sur l’arsenal des mots !
Mais le reste se tait : je n’entends aucun
son qui ne soit paisible
alors que sur la page tremble le crayon.
Et je rougis moi aussi, d’une telle exposition
d’un cadavre nu trépassé.
Appunti | Notes
Con una luna smorta che preoccupava
riposava l’uomo dagli occhi bendati
il muro screpolato d’ambizioni altrui
arrostito il cristiano col cristianesimo
nella tragedia che tu vorresti imprimere
il colore delle guance rientra
se non fosse che scrivendo te ne disfi
tastare l’aria fatta di persone che
ti ostineresti a volte di dimenticare
ma non è per questo che spio le vostre movenze
è perché le vostre movenze spiano me…
(…)
l’ultima
lezione da dare
questo lugubre parlare del domani
non mi sono disfatto della luna: l’ho semplicemente
gettata dalla finestra, ed ho mangiato allora
pane, e forse sangue
corpo imbevuto di te sino alle lacrime
i tuoi atti martellarono la mia morte
(…)
se tu vuoi avrò la tua
età di pietra insolubile
la linea gotica del tuo sentimento
le sterilizzazioni della realtà
puntando il ditto alla tua faccia
parole
poverissime nel loro abito dimesso
cerco, evidentemente,
il teschio del rinnovamento
fusione degli opposti intellettuali
continente
ch’io ridicolmente
colleziono
(…)
L’eleganza
consiglia l’impensabile
tra le viuzze attorniate
di sentimentali voci.
Punta
le dita sporcate di terriccio
Tu hai un infanticidio
nelle tue preferenze per il potere
d’un tratto essere scaraventati nell’incompiuto
hai rotto un vaso: il tuo pensiero dolorante
tutti gli amori possibili in
questa vita e nell’altra
enormi difetti
pestando il pastrano
amor proprio situato nel mezzo
già lo conosceva
come le smorfie degli eroi
subnormali nel bussare stancamente
a porte ben spalancate
ha finti istinti
sotto il vuoto di lusso
hanno coerentamente servito
questo popolo i crisantemi
parole senza colpa e senza versanti
politica del bisogno
la sanità degli altri in questo mondo
cinematografico
ombrando il segreto in
corpo feci di me il suo oggetto,
le ombre che sono
nel cavo della mano
nei loro occhi così poco
ingombri
aspirando
al miele d’un invisibile sicuro Dio
quasi una serena imbrattata marcia
positivamente
pulirsi le scarpe
le steppe hanno origine cantata, di
ballo o di balletto, di stoffa verde
Avec la lune blême qui inquiétait
l’homme aux yeux bandés se reposait
le mur craquelé d’autres ambitions
rôti le chrétien avec le christianisme
dans la tragédie que tu voudrais imprimer
la couleur des joues rentre
si ce n’était qu’en écrivant tu t’en défis
tâter l’air fait de personnes que
tu t’obstinerais parfois à oublier
mais ce n’est pour cela que j’espionne vos mouvements
c’est parce que vos mouvements m’espionnent moi…
(…)
la dernière
leçon à donner
cette lugubre manière de parler du lendemain
je ne me suis pas défait de la lune : je l’ai simplement
jetée par la fenêtre, et j’ai mangé alors
du pain, et peut-être du sang
corps imbu de toi jusqu’aux larmes
tes actes martelèrent ma mort
(…)
si tu veux j’aurai ton
âge de pierre insoluble
la ligne gothique de ton sentiment
les stérilisations de la réalité
en pointant le doigt vers ton visage
mots
très pauvres dans leurs habits défaits
je cherche, de toute évidence,
le crâne du renouvellement
fusion des opposés intellectuels
continent
(…)
L’élégance
conseille l’impensable
entre les ruelles entourées
de voix sentimentales.
Montre
les doigts tâchés de terreau
Tu as un infanticide
dans tes préférences pour le pouvoir
d’un seul coup être projetés dans l’inachevé
tu as cassé un vase : ta pensée endolorie
tous les amours possibles dans
cette vie et dans l’autre
énormes défauts
en jetant le pardessus
amour propre situé au milieu
déjà il le connaissait
comme les grimaces des héros
anormaux qui frappent avec fatigue
à des portes grand ouvertes
il a des instincts feints
sous le vide de luxe
ils ont servi de manière cohérente
ce peuple les chrysanthèmes
mots sans faute et sans versants
politique du besoin
la santé des autres dans ce monde
cinématographique
en ombrant le secret dans
le corps je fis de moi son objet,
les ombres qui sont
dans le creux de la main
dans leurs yeux si peu
encombrés
aspirant
au miel d’un Dieu invisible et sûr
presque une marche sereine et maladroite
positivement
nettoyer ses chaussures
les steppes ont une origine chantée, de
bal ou de ballet, d’étoffe verte